mardi 24 mai 2011

Quand l'auto-fiction dépasse la réalité -1-

Ce que je vis en ce moment d'un point de vue professionnel, je l'ai écrit il y a trois ans, de façon très romancée.
Le personnage du roman l'acheteur d'allumettes se bannit lui-même dans le tome I et réapparaît dans le tome II (encore inachevé), banni cette fois par ses camarades du parc à loups où il tentait de se reconstruire une identité.
Il revient alors dans son ancien laboratoire de recherches en langues (ah, tiens...) et finit par être réembauché dans des conditions très particulières.

A l'époque, c'était pour moi une manière d'exorciser mon départ "définitif", en mêlant regrets, fantasmes, espoir impossible... Mais à l'impossible nul ne paraît tenu, alors maintenant je vais vous livrer ce très long chapitre en plusieurs morceaux façon feuilleton, intitulé "quand l'auto-fiction dépasse la réalité".
Précision utile : hormis cette heureuse conjonction d'événements, le personnage de Pierre Fleury n'a pas grand-chose à voir avec moi. Inutile donc de vous affoler en croyant découvrir mes démons cachés ;))

NB : J'ai peut-être déjà mis en ligne une partie de ce chapitre, veuillez me pardonner et le relire. Une bise et des amitiés affectueuses à tous les vrais humains qui m'auraient inspiré les personnages de ce récit :


Quand l'auto-fiction dépasse la réalité
PARTiE 1


Un an.
Un an que me voilà parti.
Et me voilà revenu.
Je me suis éloigné tête basse, en silence, et je rentre de même. Mon appartement est froid et sent le moisi.
Mais c'est mon chez moi... je le reconnais.
Le répondeur téléphonique a expiré, sans doute mort de froid et d'indifférence.
Bof... si quelqu'un veut vraiment me joindre, il s'en donnera la peine.
Je reviens et je suis persuadé que n'ai pas changé d'un auriculaire. Je ne suis pas ici pour affronter mes vieux démons car je les crois endormis. Les nouveaux qui me poursuivent sont jeunes et pleins de vie, je suis déjà trop vieux pour essayer de les semer.

Je suis là et je fais mon bilan d'activités. Je ne veux plus entendre parler des loups, je continue à les aimer mais ce sont eux qui ne m'aiment pas. L'enfant qui ne voulait pas vieillir a été déçu par ses propres illusions.
Il serait bon que je contacte M. Prieur, lequel fait sans doute partie des interlocuteurs malheureux du répondeur agonisant.
Mon courrier de quatorze mois attend d'être consciencieusement épluché. Heureusement, j'avais eu la présence d'esprit de faire suivre l'administratif pour ne pas plonger dans les ennuis...
J'écoute quelques messages téléphoniques, comme par un subtil mélange entre acquis de conscience et espoir d'être aimé de mon prochain :

« Monsieur Pierre Fleury, c'est Monsieur Prieur, votre éditeur désespéré.
[gagné !]
Comme je ne sais pas où vous êtes ni comment vous joindre, j'espère que vous écouterez ce message bien vite. J'ai des choses à vous dire, des bonnes nouvelles principalement... enfin, j'attends votre appel. »

Des bonnes nouvelles ? Mes romans s'écrivent tout seuls ?

« Pierre ? C'est Mél. C'est gentil d'avoir envoyé des photos de Thérens? C'est important pour moi, Et ça le sera pour ton fils quoi qu'il arrive... Bon, tu peux nous appeler quand tu veux, tu le sais. Et si tu te poses la question, je n'ai toujours personne... »

Toujours personne... Dans quel genre de monde une femme comme Mél reste-t-elle célibataire ?

« Monsieur Fleury, je suis votre voisin du dessous... »

Là je coupe. Le voisin du dessous est peut-être bien celui qui garde tout mon courrier personnel depuis mon départ. Je me dis que j'irai le voir mais j'ai peur : peur qu'il m'appelle pour autre chose et peur d'être déçu par la minceur du tas de lettres qu'on m'a envoyées en un an.
Quoi que je fasse, j'ai toujours peur. Le mot « démarches » est terrorisant. Même celle qui consiste à descendre d'un étage... et se faire offrir un café avec la tacite obligation de me montrer poli pendant au moins quinze minutes avant de rentrer chez moi avec mon précieux paquet de lettres.

Fatigué. Je suis fatigué d'être dans le jus de ma vie. Je suis fatigué et je n'ai encore rien fait de bien folichon..
S'il faut agir, je ne sais encore comment. Céder à la facilité m'avait souvent aidé à avancer, quitte à systématiquement faire les mauvais choix. Pourquoi ne pas recommencer ?
La troisième voie...
Quand vous avez deux solutions, choisissez la troisième...
C'est mon seul acte de bravoure, de deux maux je choisis l'achat d'allumettes.

[à suivre...]

L'acheteur d'allumettes II, chapitre 2, retour à la source, Sébastien Haton

8 commentaires:

  1. "Quand vous avez deux solutions, choisissez la troisième..."
    J'adore cette formulation d'une idée qui me parle beaucoup.
    Car bonne ou mauvaise, la troisième solution a toujours un avantage: c'est la votre.

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  2. Bonjour Franck,
    Je vois que tu as parfaitement saisi l'esprit de ce passage, l'auteur est content :))

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  3. Ma boîte d'allumettes:" j'y réfléchirai demain"...Lâcheté de niveau artistique!

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  4. C'est de la pro-procrastination, à ce niveau, Manouche !
    ;)

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  5. OUI tu as bien raison choisir la 3 eme solutions oui oui je pense que c'est raisonnable
    Je te laisse j'ai trop chaud même pour pianoter
    Bonne soirée

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  6. Bonjour France !
    Encore faut-il que la troisième voie soit la bonne ;))

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  7. Ce texte est comment dire.... Remuant. A se demander si ce n'est pas la réalité qui dépasse l'auto-fiction.

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  8. Bonjour mahsou !
    Il est écrit dans l'espoir de "remuer" alors je suis content ;))
    Votre réflexion est assez juste, en tout cas les deux se recouvrent étonnamment. La suite de la suite arrive dans quelques minutes...

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